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des rabbins de Brunswick ni la protestation de leurs adversaires n’émurent les communautés juives.

À ce moment se produisit dans le monde catholique un événement qui eut son contrecoup chez les Juifs. On exposa à Trèves une tunique qu’on disait être celle de Jésus et que des millions de catholiques allaient adorer (août-octobre 1844). Cet acte d’adoration fut qualifié d’idolâtrie par quelques prêtres catholiques, notamment par Ronge et Czerski, qui se séparèrent de l’Église romaine pour fonder une Église catholique allemande (janvier 1845). Parmi les pasteurs protestants, il y eut aussi alors des dissidents qui organisèrent des communautés amies de la lumière. Ce mouvement s’étendit jusqu’aux Juifs de Breslau et surtout de Berlin, où un certain nombre d’entre eux résolurent de fonder une Église judéo-allemande sur le modèle de l’Église catholique allemande. Le principal auteur de ce projet fut Samuel Stern, orateur disert qui, sans compétence spéciale, avait fait des conférences où il avait représenté le judaïsme comme une religion susceptible des modifications les plus diverses. Il réussit à réunir autour de lui, à Berlin, une vingtaine de partisans et à créer avec eux une Société de réformes (avril 1845). Cette Société adressa un appel à tous les Juifs d’Allemagne pour provoquer la réunion d’un synode et instituer une nouvelle religion juive. Son programme ne contenait naturellement que des négations : suppression du judaïsme talmudique, abolition de la croyance à la venue du Messie, retour à la Bible, qu’on devait interpréter d’après l’esprit, et non pas d’après la lettre. Ce programme fut soumis aux délibérations d’une seconde assemblée de rabbins, réunie à Francfort-sur-le-Mein (juillet 1845).

Cette assemblée excita parmi les Juifs un intérêt bien plus vif que celle de Brunswick. parce que les réformateurs n’y avaient pas seuls la parole ; les conservateurs y étaient, en effet, représentés par un homme de valeur et très considéré, Zacharias Frankel (né à Prague en 1804 et mort à Breslau en 1875). Quoique élevé dans le respect du Talmud, Frankel ne croyait pourtant pas qu’il fût défendu d’apporter la moindre modification au judaïsme. Dans sa jeunesse, il avait même rompu une lance contre les obscurants.