Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/86

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Sur les instances de Donna Benvenida, la noble épouse de Samuel Abrabanel, appuyée par sa jeune amie Léonora, fille du vice-roi, l’empereur ne donna aucune suite à cette demande. Mais quelques années plus tard, il leur imposa de si pénibles restrictions qu’ils partirent de Naples de leur plein gré. Cette émigration volontaire fut changée en exil ; aucun Juif ne devait plus habiter Naples (1540-1541). Les uns se rendirent en Turquie, d’autres à Ancône, qui appartenait au pape, ou à Ferrare, où commandait le duc Hercule II, ami des Juifs. Samuel Abrabanel aurait pu rester à Naples, mais il ne voulut pas séparer sa destinée de celle de ses coreligionnaires, et il alla s’établir à Ferrare, où il mourut après un séjour d’une dizaine d’années. Sa femme lui survécut.

À cette époque aussi eut lieu une expulsion de Juifs en Bohème. Accusés avec des bergers d’avoir allumé des incendies, qui furent alors très fréquents dans certaines villes, et notamment à Prague, ils furent condamnés à l’exit (adar 1542). De l’importante communauté de Prague, dix familles seules furent autorisées à rester dans cette ville. Beaucoup d’exilés se réfugièrent en Pologne ou en Turquie. Cette même année encore, on reconnut la fausseté de cette accusation, et ceux qui s’étaient établis dans le voisinage de la frontière bohémienne purent revenir dans le pays. Mais ils furent obligés de payer une taxe annuelle et de porter sur leurs vêtements, comme signe distinctif, un morceau d’étoffe jaune.

Si les catholiques et les protestants ne s’entendaient pas entre eux, ils étaient, du moins, d’accord en Allemagne pour persécuter les Juifs. À ce moment, ces malheureux étaient comme pris entre deux feux. Dans le duché catholique de Neubourg, un enfant de quatre ans disparut vers Pâque. Un chien fit découvrir son cadavre après Pâque. Quelques fanatiques accusèrent les Juifs d’avoir martyrisé cet enfant et de l’avoir ensuite mis à mort. L’évêque d’Eichstaett fit immédiatement arrêter et incarcérer quelques Juifs et demanda à tous les princes voisins d’emprisonner également les Juifs de leurs domaines. Mais, malgré une enquête minutieuse, on ne put établir la culpabilité des Juifs. Ceux-ci avaient, du reste, trouvé dans cette circonstance un protecteur bienveillant dans le