Page:Graffin - Nau - Patrologia orientalis, tome 2, fascicule 2, n°7 - Les Apocryphes Coptes.djvu/12

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
126
[10]
INTRODUCTION.

Semblablement, à cause de l’importance capitale qu’avait, à côté de l’Évangile selon les Égyptiens, l’Évangile des douze Apôtres (rapproché ailleurs par saint Jérôme^^1 de l’Évangile des Nazaréens ou selon les Hébreux et de l’Évangile hébreu de saint Matthieu se trouvant dans la bibliothèque de Césarée), les critiques allemands qui ont commenté les nouveaux fragments évangéliques coptes de Strasbourg ont semblé hésiter comme attribution entre ces deux textes, tout en penchant vers l’Évangile selon les Égyptiens. J’avoue que l’étude comparative de ces fragments de Strasbourg et des miens m’amène à une conclusion toute différente. Tous également me paraissent devoir être attribués à l’Évangile des douze Apôtres. En effet, l’Évangile selon les Égyptiens^^2 comme l’Évangile selon les Hébreux^^3 ne se permettait que de très légères intercalations par rapport aux récits canoniques. Il en était tout différemment de l’Évangile des douze Apôtres^^4, beaucoup plus suspect aux premiers Pères par conséquent, en dépit de sa date relativement très ancienne.

Nous remarquerons, d’ailleurs, dans ces nouveaux fragments que nous

1. Voici le passage en question (S. Jérôme, Adv. Pelag., 1. III, ch. i) « In evangelio iuxta Hebraeos, quod Chaldaico quidem Syroque sermone sed Hebraicis literis scriptum est, quo utuntur usque liodie Nazaraeni, (in Evangelio) secundum Apostolos, sive (in Evangelio) ut plerique autumant, iuxta Matthaeum quod et in Caesariensi habetur bibliotheca, narratur historia « Ecce mater Domini et fratres eius dicebant ei. etc. ». On a cru voir une assimilation entre ces trois évangiles, fort bien distingués par Origène, par Bède, etc., dont cependant au moins l’histoire comparative nous est contée ailleurs par S. Jérôme lui-même, De viris illustribus, Migne, P. L., t. XXIII, c. 614. C’est là une erreur. Saint Jérôme faisait seulement un triple renvoi pour un texte commun aux trois sources, comme plusieurs récits sont communs aux quatre évangiles canoniques.

2. L’Évangile selon les Égyptiens, cité par saint Clément (Clem. Ad. Cor., p. 2, § 12, Migne, P. G., t. I, c. 346), par saint Clément d’Alexandrie (Clem. Alex., l. III, Strom., p. 445), par saint Épiphane (Haeres. 62), par saint Jérôme (Prooem. in Matth.), par Théodote (in calce Oper. S. CI. Alex.), par Origène (in Matth.), Tite de Bostres, Théophylacte (sur saint Matthieu), etc., suivait généralement les évangiles canoniques auxquels il ajoutait quelques détails ou de rares légendes d’un caractère essénien, comme le disent les éditeurs de la Bible de Vence Quand le monde finira-t-il ? « Lorsque, répond Jésus, deux ne feront qu’un, quand ce qui est au dehors sera au dedans, lorsque l’homme et la femme ne seront ni mâle ni femelle, et lorsque vous foulerez aux pieds les habits de votre nudité ». Salomé ayant demandé au Seigneur « Jusqu’à quand les hommes mourront-ils ? » Jésus répondit « Tant que vous autres femmes produirez des enfants. » « J’ai donc bien fait de n’avoir point d’enfants », répliqua Salomé. Mais le Sauveur lui dit « Nourrissez-vous de toute sorte d’herbes, à l’exception de celle qui est amère (du péché). » Ailleurs on prête au Christ ces paroles « Je suis venu pour détruire les œuvres de la femme. » C’est là tout ce que nous savons de cet évangile, si l’on en excepte un passage de saint Épiphane, lui attribuant des idées sabelliennes.

3. M. Nicholson a publié et commenté tous les passages attribués à cet Évangile dans son ouvrage The Gospel according to the hebrews, Londres, 1879. Les extraits donnés par lui prouvent combien cet évangile était généralement synoptique par rapport aux évangiles canoniques et combien courtes étaient les intercalations.

4. Beaucoup plus nombreux et plus considérables sont ici les récits complets et étrangers aux évangiles canoniques, bien que ces récits rentrent dans la trame historique des textes sacrés. Il en est de même, d’ailleurs, dans les textes de Strasbourg, dont certains passages visent, du reste, évidemment d’autres fragments récemment découverts par nous de l’Évangile des douze Apôtres, par exemple celui-ci : « Je vous ai révélé toute ma gloire et je vous ai enseigné votre puissance et le mystère de votre apostolat. sur la montagne. Ce discours que Jésus adresse à ses Apôtres après la résurrection vise, avec certitude, la bénédiction donnée par le Sauveur aux Apôtres sur la montagne alors qu’il leur prophétisa leur rôle, suivant nos nouveaux textes.