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INTRODUCTION.

maliel en question qui fut président du sanhédrin entre l’an 70 et l’an 82 de Jésus-Christ après la destruction de Jérusalem, à propos d’un cas particulier à sa sœur, opposait ou faisait- opposer la loi juive de Moïse qui refusait tout droit d’hérédité aux femmes, à une autre loi récente qui mettait la fille et le fils sur le même pied. On donnait la préférence à cette dernière (la loi chrétienne) et on citait deux textes qu’on a crus tirés de l’Évangile selon les Hébreux et qui ont pu fort bien être tirés de l’Évangile des douze Apôtres rédigé par l’ancien Gamaliel (celui des Actes). On comprendrait très bien en effet comment devant Gamaliel le jeune on aurait cité (selon une tradition juive évidemment postérieure) un évangile émanant de sa famille et que justement — du moins pour certains passages — saint Jérôme rapproche de l’Évangile des Nazaréens ou des Juifs convertis.

Quoi qu’il en soit de cette hypothèse, l’auteur qui a rédigé la plupart de nos fragments semble préoccupé par l’idée de montrer l’affection du Christ pour tous ses apôtres, de détailler les bénédictions dont il comble chacun d’eux, séparés ou réunis, bref de mettre le plus possible en lumière le corps apostolique, ce qui convient bien à un évangile des douze Apôtres. Si même on admet cette hypothèse vers laquelle j’incline de plus en plus maintenant que, tout en suivant généralement le cadre historique des évangiles canoniques, l’auteur de notre texte ait voulu ne pas s’arrêter à la résurrection du Christ, mais prolonger son récit jusqu’à l’assomption de Marie, arrivée quinze ans après selon la tradition, pour rapprocher, en quelque sorte, ces deux miracles, nous trouverons à la fin de ce récit la déclaration expresse, qui est censée faite collectivement par les apôtres à Gamaliel, que tout ce qu’ils ont raconté, ils l’ont vu de leurs propres yeux, déclaration analogue à celle que fait ailleurs Gamaliel, selon un passage déjà reproduit.

Il va sans dire qu’à notre avis rien de tout cela ne remonte effectivement jusqu’aux apôtres et jusqu’à Gamaliel l’ancien^^1 ; mais les récits très circonstanciés de l’Évangile en question ne nous donnent pas moins de curieuses traditions devant avoir été écrites dès le second siècle, comme les Gesta Pilati, etc., puisque dès le troisième, Origène en fait un apocryphe très ancien pouvant être antérieur à l’œuvre de saint Luc (que saint Jérôme, avec preuves à l’appui, nous représente comme le disciple et le secrétaire de saint Paul, soit pour son Évangile, soit pour les Actes des Apôtres).

Dans les premiers fragments publiés par moi et que viennent compléter d’autres morceaux, il est question d’un certain Carius envoyé par Tibère pour

1. Pour la critique détaillée de ces textes comparés à ceux des évangiles canoniques, voir notre travail intitulé « l’Évangile des XII Apôtres récemment découvert », extrait de la Revue biblique, avril et juillet 1904. J’ai retrouvé depuis un nouveau fragment important, reproduit et commenté plus loin, p. 68.