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INTRODUCTION.

éditeurs l’ont fait précéder de la note : Nugacis graeculi opusculum.

On pourra contrôler la vérité de ce jugement en comparant la version de saint Jean Chrysostome que nous allons éditer, au texte grec de Nestorius. Par exemple :

Saint Jean Chrysostome.
Nestorius (p. 849-50).

Pourquoi lui dis-tu de se jeter de sa propre volonté ? Y a-t-il un homme qui se tue de sa propre volonté et qui demande le secours de Dieu ? Dieu ne secourt pas ceux qui se tuent. Si le mal vient nécessairement sur quelqu’un et qu’il implore Dieu, il en recevra du secours, mais celui qui aura attiré le mal sur lui-même repousse le secours de Dieu de près de lui (II, 15).

Je sais que les anges ont reçu ordre au sujet des hommes, mais pas lorsqu’ils se jettent dans les précipices et pas lorsqu’ils meurent le voulant ni quand ils mettent (Dieu) à l’épreuve sans besoin. Car celui qui se tue lui-même et qui demande à être secouru, persifle la promesse divine ; il tente Dieu, s’il (l’)excite (à venir) à son secours ; comme un railleur il l’irrite en se tuant et en demandant à être secouru. Celui qui est poussé à la perte peut invoquer Dieu, mais celui qui tombe volontairement mérite de périr comme s’étant donné la mort. La parole (suivante) est raisonnable et juste : de croire, à la vérité, en Dieu, mais de ne pas courir avant le temps aux périls.



Nestorius aime les mots qui font image : θέατρον, θρίαμϐος, λογισμὸν ἀθλητιϰόν, τί τρυγᾷς ὄμφαϰας τοὺς βότρυας τῆς φύσεως ; il a recours, pour frapper davantage, à quelques réalismes osés : ὡς γὰρ τὴν παρθένον ἡ σύλληψις ὄγϰωσεν, αὐτῷ δὲ μίξιν ὁ μνηστὴρ οὐ συνήδει... ἔτι γὰρ βρέφος ὁ δεσπότης ὑπάρχων, ἔτι τὸ τῶν ὠδίνων οἰϰῶν ἐργαστήριον ; il accumule les synonymes : μὴ ἐπιλαθώμεθα πάλης... μὴ λήθῃ παραδῶμεν ἀγῶνας... μὴ σϰῶμεν ἐν ἀμνηστίᾳ... mais toujours les phrases sont soigneusement équilibrées et les mots sont choisis et disposés pour l’agrément de l’oreille, quel que soit leur sens : ἔτι τὸ τῶν ὠδίνων οἰϰῶν ἐργαστήριον ἐφεδρεύοντα τὸν ἀντίπαλον εἶχεν δύναμιν ἀστράπτων τῴ διαϐόλῳ στρατηγίϰην. Si l’on ajoute que Nestorius était doué d’un physique agréable[1] et d’une voix claire et féminine, on comprend que ces phrases sonores, débitées d’une belle voix de ténor, aient pu avoir du succès : « beaucoup qui venaient à l’église ne le faisaient que pour entendre le son de sa voix[2] ».

  1. « Il était jeune, roux, avec de grands yeux et un beau visage ; on aurait dit un second David. » Lettre à Cosme ; cf. infra, p. 280 [170].
  2. Ibid.