Page:Grammont - Petit traité de versification française, 1908.djvu/44

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particulièrement rapide et léger, mais ne convenant guère qu’à des pièces courtes :

J’ai dit à mon cœur, | à mon faible cœur :
N’est-ce point assez | de tant de tristesse ?
Et ne vois-tu pas | que changer sans cesse,
C’est à chaque pas | trouver la douleur ?

(Musset, Chanson)

Le décasyllabe était en ancien français le vers de l’épopée. Aux xive et xve siècles il est le vers commun, c’est-à-dire le plus usité dans presque tous les genres ; très employé encore au xvie siècle, il perd beaucoup de terrain au xviie, remplacé presque partout par l’alexandrin, et le xixe siècle ne s’en sert plus qu’exceptionnellement.

Le vers de huit syllabes. — Le vers de huit syllabes n’a pas de césure en ancien français, mais il a toujours au moins une syllabe fortement accentuée dans l’intérieur. En français moderne il a une coupe libre, quelquefois deux :

Ô dieux ! | ô bergers ! | ô rocailles !
Vieux Saty|res, Termes grognons ;
Vieux petits ifs | en rang d’oignons,
Ô bassins, | quincon|ces, charmilles !

(Musset, Sur trois marches de marbre rose)

Aussi usité en ancien français que le vers de dix syllabes, l’octosyllabe a moins perdu de nos jours que son concurrent. Vers de la poésie narrative, didactique, dramatique au moyen âge, il devient essentiellement le vers lyrique au xvie siècle, le vers de l’ode, et garde cette fonction aux xviie, xviiie et xixe siècles, sans cesser pour cela de servir toujours pour la poésie légère.