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UN BARBIER RASE L’AUTRE

ordinaire, ne laisse pas quelquefois d’être gênante… Récapitulons ! Il me faut, ce soir, un homme dévoué pour tenir l’échelle, un alcade aveugle et des serenos[1] discrets. Il me faut encore un asile sûr, où, près d’une femme de bon renom, Rosine puisse attendre le notaire et le prêtre, si par hasard ceux-ci ne se trouvaient pas sous la main. La moindre de ces choses demanderait trois jours de recherches, et j’ai à peine trois heures devant moi ! Je le donne en vingt au plus matois des ambassadeurs… Eh ! mais, qu’est-ce donc que j’aperçois entassé contre la borne ?… Ce manteau brun, ce bâton, cette plaque… Jour de Dieu ! c’est Barcino, le plus adroit corchete[2] de la place San-Francisco… Eh ! Barcino, dors-tu, veilles-tu, maraud ?

BARCINO, se réveillant à demi.

Où va Juanica, la brune,
Lorsqu’elle sort du couvent ?
Elle ne craint pas le vent,
Mais si fait le clair de lune…
Elle ne craint pas le vent,
Mais… si… fait…

(Il se rendort)

Figaro. — Le drôle est plus ivre qu’un frère de la Capacha… Lève-toi, bête brute.

(Il le pousse du pied.)

Barcino. — Jifero[3], je te méprise… va chercher tes puces ailleurs.

(Il se rendort.)

Figaro. — Je ne le réveillerai jamais, et le pauvre diable

  1. Sereno, crieur de nuit.
  2. Corchete, officier de police, inférieur aux alguazils
  3. Jifero, nom de mépris donné aux bouchers.