Page:Grave - L’Anarchie, son but, ses moyens.djvu/14

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car, si juste soit-elle, elle ne représente, quelle que soit la largeur de conception de ceux qui la font, qu’une partie du développement humain, qu’une infime parcelle des aspirations de tous ; toute loi formulée par un parlement, loin d’être l’œuvre d’une grande conception, n’est, au contraire, que la moyenne de l’opinion générale, car le parlement lui-même, de par le fait de son recrutement ne représente qu’un juste milieu très médiocre.

Appliquée à tous de la même façon la loi devient ainsi, de par la force des choses, arbitraire, injuste pour ceux qui sont en deçà ou au delà de cette moyenne.

Une loi ne pouvant représenter les aspirations de tous, ne peut donc s’appliquer que par la crainte du châtiment à ceux qui l’enfreindraient, son application entraîne l’existence d’un appareil judiciaire et répressif ; elle devient ainsi d’autant plus odieuse que sa coercitivité est plus forte.

La loi, injuste déjà, parce que, conception de minorité ou de majorité, elle veut imposer sa règle à l’unanimité, sera rendue encore plus injuste parce que, appliquée par des hommes qui ayant les défauts et les passions des hommes, leurs préjugés, leurs erreurs personnelles d’appréciation ne peuvent, par conséquent, quelle que soit leur probité, l’appliquer que sous l’influence de leurs erreurs et de leurs préjugés.

Il ne peut y avoir de bonnes lois, ni de bons juges, ni, par conséquent, de bon gouvernement puisque son existence implique une règle de conduite unique pour tous, alors que c’est la diversité qui caractérise les individus.