Page:Grave - La Grande Famille.djvu/18

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durer, ce n’est pas le métier de chiens savants que l’on nous enseigne, ce que je ne puis digérer, c’est de me sentir un fusil entre les pattes, c’est de me dire que nous sommes là des milliers d’andouilles qui, par notre crainte du pouvoir fictif qu’octroient ces symboles, nous fournissons la force effective qui nous asservit.

C’est parce que nous sommes assez lâches pour obéir que subsiste cette autorité. Tiens ! quand j’y pense je vois rouge, et un gradé viendrait là m’emmerder, il me semble que je lui laisserais, avec volupté, tomber la crosse de mon fusil sur la gueule.

— Ha ! mon vieux colon, si tu le prends sur ce pied-là, tu n’as pas fini de te faire de la bile. Sans compter que des dispositions semblables peuvent le faire « manger de la boîte », plus souvent qu’à ton tour… si elles ne t’envoient pas à Biribi ou au peloton d’exécution… Brrr… tu sais ! ma mère n’en fait plus, il faut que j’aie soin de son fils. Je préfère encore baisser la tête lorsqu’un « pied de banc » ou un « cabot » passe sa colère en me traitant de Jean-foutre. S’il me fout à la boîte, j’ai la consolation de me dire que ça compte sur le congé… et vogue la galère !… ici, il ne faut pas avoir l’épiderme délicat si on ne veut pas se faire « rallonger la ficelle. »

— Oui, certainement, pour la majorité des gens,