Page:Grave - La Grande Famille.djvu/250

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ça, je le reconnais, c’est juste ; les autres pays nous mangeraient si nous n’étions pas en état de nous défendre. Mais, enfin, il y aurait moyen d’arranger cela de façon à ce que ceux à qui le métier déplaît ne soient pas forcés de partir. Ainsi, on a beau dire, mais le système de remplacement avait du bon.

— Pour ceux qui avaient de l’argent, goguenarda Mahuret.

— C’est-à-dire, fit Caragut qui n’avait soufflé mot jusque-là, que si le remplacement existait encore, tu aurais donné dix-huit cents ou deux mille francs à un pauvre diable pour qu’il aille, chez les Annamites, se faire casser la gueule pour toi ; se faire anémier par le soleil de Cochinchine ; gratter les boyaux par la dyssenterie pour que tu restes tranquille chez toi, à faire valoir ton bien.

— Pourquoi pas, après tout, les deux mille francs que je lui aurais donnés ne se gagnent pas comme cela à rien faire. C’est qu’il faut gratter dur et longtemps, pour les mettre de côté, il faut savoir courir des risques.

— D’ailleurs, tous n’y crèvent pas, fit un autre — un pauvre diable, qui, avant de venir au régiment, était forcé de se louer chez les fermiers — on en revient, et avec deux mille francs, on pourrait avoir une belle pièce de terre. Et à la lueur