Page:Grave - La Grande Famille.djvu/252

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ves-tu que ça soit plus juste d’en forcer un autre à les donner à ta place ? Parce que tu auras de l’argent à lui donner, et que l’appât du gain lui fermera les yeux sur les inconvénients qui l’attendent, crois-tu que ces inconvénients en existeront moins, et lui seront moins poignants que pour toi qui obéis à la crainte du gendarme ? Les avanies en sont-elles moins écœurantes parce que le mobile qui vous les fait affronter n’est pas le même ?

— En tous cas, il aura toujours été payé.

— Si le marché avait été résiliable, crois-tu qu’il n’aurait pas été rompu plus d’une fois ?

— Mais alors, si tu es content qu’il n’y ait plus de remplaçants, si ça te plaît de voir tout le monde faire ses cinq ans, de quoi te plains-tu ? tu devrais être content d’être soldat !

— Hé non ! Ce que je trouve mal, c’est qu’il y ait des soldats. Je voudrais voir disparaître de nos mœurs, cette plaie hideuse, le militarisme, qui nous ronge et nous affaiblit.

Réfléchis un peu : Nous sommes jeunes, pleins de vigueur ; l’existence nous sourit, notre être ne demande qu’à s’étendre et à se développer et notre cœur à s’ouvrir à tous nos semblables. On nous prend et on nous enferme dans des casernes où tout nous est mesuré : l’air, l’espace, la lu-