Page:Grave - Le Mouvement libertaire sous la IIIe République.djvu/172

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soit 75 francs. J’ai à m’excuser de ne vous avoir pas encore envoyé de fonds depuis mon premier versement. Mais une suite d’événements imprévus m’a raflé tout mon argent superflu. Veuillez cependant croire à mon dévouement et n’hésitez jamais à faire appel à ma bonne volonté. Je ferai toujours le possible pour les Temps Nouveaux qui, malgré que je ne sois pas toujours de votre avis, sont d’une haute importance révolutionnaire.

Ne pourriez-vous pas grouper un certain nombre d’adhérents qui s’engageraient à verser, chacun selon ses moyens, tant par mois ? Vous auriez ainsi une somme assurée et vous pourriez faire patienter l’imprimeur.

Quoi qu’il en soit, je suis à votre disposition pour faire insérer un appel de votre part dans l’Ermitage et, sans doute, dans le Mercure, sans oser espérer, hélas ! une réponse bien décidée. Retté pourrait organiser une souscription à La Plume.

Cordialement,
Stuart-Merrill.

La bonne volonté de Stuart-Merrill était d’autant plus désintéressée que, n’écrivant que des vers purement littéraires, les Temps Nouveaux ne reproduisirent jamais rien de lui, ne lui firent jamais la moindre réclame.

Je n’ai pas, ici, à raconter la série d’attentats qui se déroulèrent en Espagne depuis 1892. Attentats motivés par la férocité du général gouverneur de Montjuich. Je n’ai plus les détails présents à la mémoire. D’autre part, je n’ai pas la prétention d’écrire l’histoire de cette période, mais seulement les quelques événements auxquels j’ai été plus ou moins mêlés. Il m’était arrivé, pendant ma détention, une énorme correspondance d’Espagne que mon ignorance de l’espagnol m’avait empêché d’apprécier sur le moment, et qui était restée enfouie quelque temps dans un tiroir de la table qui me servait de bureau.

Ayant fini par trouver un camarade qui voulût bien se charger de la traduction, il se trouva que c’étaient des lettres de camarades espagnols arrêtés à la suite des événements du Liceo, enfermés à Montjuich, et que l’on avait torturés pour leur arracher l’aveu d’une participation audit attentat, participation qui n’existait que dans la volonté des juges de trouver des victimes à frapper.