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XII

PENDANT L’AFFAIRE DREYFUS


Si nous avions eu quelqu’un parmi nous pour aller, dans les groupes, dans les réunions publiques, cela nous aurait été d’un grand appui. Car le grief le plus fréquent était : « que l’on ne nous voyait jamais nulle part ». D’aucuns en profitaient pour créer des légendes.

Je me rappelle qu’un jour que nous parlions des difficultés financières du journal, un camarade s’écria : « Ah ! oui, c’est la rédaction qui coûte cher ».

Je le regardai. Certes, il était de bonne foi, ne pensant pas à mal.

— Que voulez-vous, répondis-je ironiquement, il y en a à qui il faut des danseuses.

J’avais pris la direction du journal, avec la résolution de ne pas en faire une chapelle, d’éviter toute camaraderie, en ce qui concerne le choix des articles. Mon impartialité me valut beaucoup d’ennemis et la réputation d’être autoritaire, sectaire. Que sais-je ? « Le journal, c’était Grave » !

Une double erreur. Car, une fois que je savais qu’un camarade pouvait nous donner de bons articles, j’envoyais la copie à l’imprimeur sans la lire. Et même lorsque nous n’étions pas d’accord sur les conclusions, je ne me permis jamais de les corriger, comme quelques-uns firent des miens lorsqu’ils « piratèrent » le titre du journal.

Girard me quitta un moment, parce que Maurice Lachâtre voulant refondre son dictionnaire lui avait proposé d’en prendre la direction. Comme les offres qu’il lui faisait étaient meilleures que ce que j’avais la possibilité de lui donner, je l’engageai moi-même à accepter.

Delesalle me quitta sur un refus que je lui opposai de le