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Gobelins, avec un poste de police. J’y fus conduit. Là, m’attendait une sorte de colosse que, par la suite, j’appris être le sieur Fouqueteau, commissaire de police du quai de Gesvres.

— Ah ! vous l’avez, fit-il vivement, et comme relevé d’anxiété. Qu’est-ce qu’il y a chez lui ?

— Oh ! c’est plein de papiers. J’avais les invendus de l’Égalité.

— Ah ! nous allons voir cela.

Je fus laissé sous la surveillance de deux « sergots », pendant que Fouqueteau, suivi de ses deux acolytes, allait perquisitionner chez moi ; — sans moi, autre entorse à la loi.

Après un temps qui me sembla assez long, revinrent mes trois escogriffes. Je fus emballé dans un fiacre, avec Fouqueteau et un des policiers, pendant que l’autre grimpait sur le siège, à côté du cocher.

En route, Fouqueteau me raconta ses souvenirs de lycée, qu’il dépeignit un peu comme une prison.

Arrivé à son bureau qui se trouvait dans les bâtiments du Théâtre, aujourd’hui théâtre Sarah-Bernhardt, je fus fourré au « violon » où je restai un temps assez long, à mon estimation. J’en fus tiré, à la fin, pour être conduit au Dépôt.

Dans ma cellule se trouvait déjà un jeune homme de dix-sept à dix-huit ans, — quelque employé sans doute, — arrêté, me dit-il, pour avoir « volé » des pommes dans un champ.

La journée se passa assez monotone. Je ne savais de quel « crime » j’étais accusé. Mais la durée de notre incarcération dépendait de notre juge d’instruction. Et, quoique la magistrature soit « indépendante », cela dépendait aussi des ordres qu’il avait reçus. D’autre part, j’avais oublié, en partant, de prendre de l’argent, et l’ordinaire du Dépôt n’avait rien de bien ragoûtant.

Il faisait nuit, lorsqu’on vint me chercher pour me conduire à l’instruction.

C’était un mot d’ordre, parmi nous, de ne jamais répon-