Page:Grave - Le Mouvement libertaire sous la IIIe République.djvu/60

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surtout de l’échelle de meunier. Quelques mois après notre retour, j’éprouvai l’affreuse douleur de perdre ma femme en couches emportée par la fièvre, ainsi que l’enfant, un superbe garçon. La question du logement me devînt fort indifférente. Le provisoire dura dix-sept ans.

Dans les premiers temps, je fus, un soir, appelé à descendre sur la place ; quelqu’un désirait me parler.

J’y trouvai quatre bonshommes qui, après quelques pourparlers, me confieront qu’ils étaient gardiens de prison, à la Roquette. Révolutionnaires et désireux de servir la propagande, ils me remirent une petite souscription. Je ne les revis plus, mais j’appris, plus tard, qu’ils avaient été déplacés.

Lors des arrestations de 94, l’un d’eux, je le sus par un camarade qui s’était trouvé dans son service, à Massas, se rendit utile à plusieurs des arrêtés, leur faisant passer des journaux, les mettant au courant de ce qui se passait dehors.

Une autre fois, le marchand de vins qui tenait la boutique de la maison me remit, de la part d’un de ses clients, un ou deux francs, pour la propagande et me fit, à diverses occasions, des versements semblables. Je finis par savoir que c’était un des « sergots » qui était de service dans la rue.

Nous nous attardions à bavarder lorsque je le rencontrais. Mais, déception amère, il me confia un jour qu’il était passé dans le service des mœurs ! Dégoûté, je cessai de lui parler. Il cessa par contre de verser à la propagande.

À différentes reprises, surtout au plus chaud des persécutions, je reçus des renseignements anonymes sur ce qui se tramait à la « boîte ». Une fois, entre autres, il s’agissait d’un pseudo-attentat du côté de Clichy. On me donna le nom de l’auteur, un individu que nous connaissions, en effet, comme très suspect, et qui ne fit que passer, du reste, dans le mouvement.

Comme à Genève, quelques camarades prirent l’habitude de venir bavarder le dimanche matin.

Pendant mon absence de dix-huit mois, de Paris, le mouvement s’était étendu. Ce n’était plus le « demi-