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VI

À SAINTE-PÉLAGIE


On ne me laissa pas moisir. La condamnation étant devenue effective, je fus aussitôt appelé à la Préfecture de Police, où on me donna l’ordre de me constituer prisonnier.

Le lendemain, je me présentais au greffe de Sainte-Pélagie, d’où je fus mené à une des cellules du Pavillon des Princes.

Dans la journée toutes les cellules étaient ouvertes, les prisonniers pouvaient fréquenter les uns chez les autres. Là, je trouvai réunis, un vague journaliste qui signait d’un pseudonyme. De ses explications — traduites — il ressortait qu’il avait voulu faire chanter le Casino de Monte-Carlo, mais, n’étant pas de taille, il s’était trouvé que c’était lui qui avait écopé ; un chef de bureau de poste qui, éditeur d’un petit journal professionnel, y avait mal parlé de l’administration ; une petite fripouille, du nom de V…, connu dans les groupes anarchistes sous le nom de « Pas d’Erreur », son exclamation favorite.

J’ai dit petite fripouille, il n’était que cela. Prêt à toutes les sales besognes. Il devint, par la suite, le factotum de la Limouzin, pour finir dans je ne sais quelle boue.

Il y avait enfin Malato.

Quelque temps auparavant, il avait publié en brochure — que Stock réédita plus tard en volume — sa Philosophie de l’Anarchie. Là dedans, il expliquait que, pour faire la révolution, les anarchistes devraient accepter de se donner des chefs.

Rendant compte de la brochure, j’avais osé avancer que cela pouvait bien être de la philosophie de Malato, mais quant à de la philosophie anarchiste, cela restait à voir.