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EN RACONTANT

coriace et difficile à digérer. Une petite fille cependant parvint à se faire à ce régime. Elle en coupait une tranche qu’elle laissait dans de l’eau pour la faire dessaler, puis la faisait chauffer sur le poële et la mangeait.

Jones me montra sa dernière obligation envers les marchands à qui il devait encore. Cet achat ne contenait que quelques articles, tels que de la farine, des biscuits de matelot, quelques clous, de la ficelle et du fil ; il n’était aucunement fait mention de porc, de thé, de sucre, de mélasse ou de tabac, ces objets étant considérés comme des friandises qu’ils ne pouvaient se permettre. On leur chargeait la farine $15 le quart, les biscuits $5 par cent livres, quinze centins pour une livre de clous, et cela en échange de poissons à un bas prix.

En justice pour les marchands, je dois faire remarquer que si leurs prix paraissent élevés, ils subissent souvent des pertes considérables, car quand un pêcheur n’a pas la volonté ou ne peut pas payer, c’est une perte sèche pour eux. Impossible de retirer quoi que ce soit de ces gens-là, qui ne sont pas propriétaires du sol ni d’aucune autre valeur susceptible d’être saisie.

Cette famille si éprouvée avait vendu peu à peu ses meubles, ses effets de ménage, jusqu’aux lits de plume, à des trafiquants qui passaient par là en goëlettes. Jones me pria de sortir pour aller voir