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LES PÊCHEURS DU LABRADOR

Je suis heureux de dire que l’année qui suivit apporta plus de bonheur à Jones, et qu’il eut la chance de faire une pêche profitable ; mais sa pauvre femme n’a pu partager pendant longtemps sa bonne fortune : elle est morte de consomption peu de temps après. Il n’y a aucune circonstance de ma carrière officielle qui m’ait donné d’aussi douces émotions, que celle où, grâce à la sollicitude intelligente du gouvernement, j’ai pu apporter un soulagement à une aussi profonde misère, et quelque peu de bonheur à une famille aussi cruellement éprouvée.

À Blanc-Sablon, je constatai aussi que plusieurs autres familles étaient dans un tel état de pauvreté, qu’elles n’auraient certainement pas passé l’hiver, sans ce secours opportun.

Non seulement la pêche aux loups-marins avaient fait défaut, mais celle de la morue et du hareng avait été presque nulle.

J’ai été heureux de constater que, sur aucune partie de la côte, l’usage de la boisson n’avait en rien contribué à la misère qui y régnait. D’ailleurs, je ne crois pas qu’il soit possible de s’en procurer.

Vraiment, c’est un spectacle affligeant de voir des hommes forts et courageux, dont l’existence est sans cesse menacée par les dangers de la mer et la rigueur des saisons, succomber au découragement, en face de déceptions et d’insuccès répétés.