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Page:Grelé - Jules Barbey d’Aurevilly, L’œuvre, 1904.djvu/215

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Oïl devine qu'une pareille esthétique ne devait pas avoir grande prise ni exercer une profonde influence sur les hommes du XIX'^ siècle. Elle se condamnait d'elle- même à Timpuissance, en un âge de pensée libre, indopen- dante el jalouse de son autonomie. Au surplus, la manière dont Barbey d'Aurevilly la soutint et l'appliqua ne pouvait contribuer à la rendre, non pas populaire, mais acceptable. Elle a été reniée jusque par ceux-là qui avaient en commun avec le critique des Prophètes du Passé nombre de sentiments, de croyances et de préjugés. De même que son esthétique romanesque, elle se trouvait être un singulier mélange de romantisme extérieur et de réalisme interne: par là elle n'était susceptible de satis- faire ni les romantiques épris de belles formes plutôt que d'idées anciennes, ni les réalistes convaincus delà supériorité des libres tendances individuelles sur la contrainte rapetissante des dogmes quels qu'ils soient.

Pour bien mettre en lumière les divers aspects de l'esthétique de Barbey d'Aurevilly, il suffit de citer quelques passages significatifs de son œuvre, tant critique que romanesque. Voici. par exemple, un fragment, tout à fait inconnu, d'une étude sur Balzac où, au lende- main de la mort du grand romancier de la Comédie humaine, l'auteur d' 6'» c Vieille Maitresse esquissait un jugement sommaire de l'esprit et de l'influence de son glorieux précurseur. L'article est resté enfoui dans La Mode en 24 août 1850: il offre donc le double intérêt d'un document et d'un morceau presque inédit. « La France et l'Europe, — écrit d'Aurevilly, — ont perdu, cette semaine, l'une des plus hautes illustrations du XIX*" siècle. Nous ne sommes encore qu'à la moitié de ce siècle, mais, quelle qu'en doive être la fin, les hommes comme