Page:Grelé - Jules Barbey d’Aurevilly, L’œuvre, 1904.djvu/388

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par de fiers éclats de caraclèi-e, que lo poète de r/:'».wr- celéc doit de n'av(Mr pas eu, de son vivant, la rcMioininée dont il était digne et de n'avoir pas connu les caresses delà fortune qui furent prodiguées à d'éphéntcres chroni- queurs '< Portrait dépaysé, je cherche mon cadre », disait-il un jour mélancoliquement à Trebutien. Ce cadre, où son allière physionomie pût se mouvoir à Taise, il ne Ta jamais trouvé.

Les contemporains n'étaient pas loin de considérer l'auteur des Prophètes du Passé comme un revenant du moyen-âge, un attardé magnifique et hautain des époques les plus reculées de l'histoire mérovingienne. On jugeait le sculpteur Auguste Préault bien indulgent et bien complaisant, lorsqu'il déclarait avec bonne humeur : «Barbey! c'est le descendant de quelque naufragé de l'in- vincible Armada, qui aura fait souche sur la côte nor- mande ! » Sainte-Beuve, même dans ses rares moments de bienveillance, n'aurait peut-être pas souscrit à cette boutade, qu'il eût estimée trop élogieuse. 11 ne savait déterminer à quelle famille d'esprits apparlcMiail l'ex- traordinaire « individualiste de la Basse-Normandie ».

De fait, il semble difiicile d'assigner une place très précise, dans le puissant mouvement intellectuel de la France, à l'apologiste endurci des œuvres et des hommes d'autrefois ! Quel rang lui imposer dans notre XIX« siè- cle ? Certes, on peut fort bien dessiner « la courbe de l'évolution» des idées et des formes d'art où se moule la ligure du siècle de Chateaubriand et de Hugo, sans y faire entrer la silhouette déconcertante du plus étrange des écrivains. Mieux encore: il est loisible de dresser un inventaire exact, — sinon tout à fait complet, — des créations romantiques et des œuvres réalistes, sans V donner accès aux productions si personnelles du