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Page:Grenier - Souvenirs littéraires, 1894.djvu/34

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Qu’on se rappelle son discours sur les fortifications de Paris, où il a peint d’avance la Commune, et celui sur la rentrée des cendres de Napoléon, où il prévoit et prédit le retour de l’Empire, et cela en 1840.

À propos de Machiavel, je lui demandai ce qu’il pensait du buste du secrétaire Florentin qui est aux Offices. Il n’en avait pas gardé souvenir. Je me rappelai que Lanfrey en avait une photographie. J’allai la chercher et la lui apportai. Il la regarda un instant : « Ça, s’écria-t-il avec mépris, un portrait de Machiavel ! Jamais ! » Et, dans sa colère, je vis le moment où il allait jeter à terre et briser le cadre et la photographie, comme s’ils lui appartenaient. Je me hâtai de la reprendre de ses mains pour pouvoir la rendre à Lanfrey. Si j’ai cité ce mouvement et si j’en ai été frappé, c’est qu’il me prouva une fois de plus la rapidité et la sûreté de son jugement dans certains cas. Il avait, comme je l’ai dit, des intuitions étonnantes et souvent infaillibles. Je ne sais si le buste de Florence porte encore aux Offices la même attribution ; mais Lamartine avait raison : ce n’est pas le portrait de Machiavel, c’est celui d’un duc de Bourgogne. J’en ai acquis la certitude plus tard, à l’une de nos expositions rétrospectives.

À part ces jugements d’instinct et ces éclairs d’intuition, il ne possédait pas le vrai sens critique,