Page:Grillet - Les ancêtres du violon et du violoncelle, 1901,T1.djvu/43

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De forme peu gracieuse, lourd d’aspect, le crouth rappelle une lyre antique ayant une caisse sonore très allongée et se rapproche beaucoup comme construction de la cythara teutonia, à cordes pincées, dont on voit deux exemples dans le manuscrit de Saint-Blaise, du ixe siècle, publié par Gerbert[1]. Si cette dernière avait un manche surmonté d’une touche au-dessous de ses cordes, elle ressemblerait à un crouth et réciproquement.

En résumé, le crouth du manuscrit de Limoges, n’est autre qu’une lyre à trois cordes et à archet ; mais une lyre disposée pour produire plusieurs sons soutenus à la fois. Le moindre examen de son chevalet tout à fait plat, ne laisse pas de doute sur ce point ; car il devait être impossible de passer l’archet sur la corde du milieu sans toucher les deux autres et, par suite, on y faisait forcément entendre des harmonies successives, d’autant plus faciles à obtenir, que tous les doigts de la main gauche, y compris le pouce, passaient par l’ouverture à droite de la touche : cette main appuyait donc complètement à plat contre le manche, et chacun des doigts venait presser naturellement les trois cordes à la fois. Ce fait ne saurait être mis en doute, car le pouce ainsi que les autres doigts de la main gauche, sont dessinés avec beaucoup de précision.

Il existe une autre représentation du crouth à trois cordes : crowth trithant, parmi les sculptures extérieures de l’abbaye de Melrose, en Écosse, qui fut construite au début du xive siècle, sous le règne d’Édouard II.

En France, on perd la trace du crouth depuis le ixe siècle, mais en Angleterre, dans le pays de Galles, l’usage s’en est continué jusqu’à la fin du xviiie siècle.

Le crouth était l’instrument des bardes, qui s’en servaient, ainsi que de la harpe, pour accompagner leurs chants.

  1. De cantû et musicà sacrà, déjà cité.