Page:Grillet - Les ancêtres du violon et du violoncelle, 1901,T2.djvu/42

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Mademoiselle de Limeuil, une des filles d’honneur de la reine Catherine de Médicis, se fit aussi jouer du violon à sa mort, et c’est encore la Défaite des Suisses[1] qui en fit les frais. Voici comment Sauval raconte le fait :

« Mademoiselle de Limeuil, quand l’heure de sa mort fut venue, fit venir son valet Julien : — Julien, lui dit-elle alors, prenez votre violon et sonnez-moi toujours, jusqu’à ce que vous me voyez morte, la Défaite des Suisses. Et quand vous serez sur le mot : Tout est perdu, sonnez le pas quatre ou cinq fois le plus piteusement que vous pourrez. — Ce que fit Julien, et elle-même aidait de la voix ; et quand ce vint : Tout est perdu, elle réitéra par deux fois ; puis se retournant de l’autre côté du chevet, elle dit à ses compagnes : — Tout est perdu à ce coup ! — Et à bon escient, car elle décéda à l’instant[2].

Un joueur de violon était attaché à la personne de Louis XIII, pendant sa jeunesse :

« Le 3 février, mardi, à Saint-Germain. — Le Dauphin avoit pour violon et joueur de mandore Boileau, et pour joueur de luth, Florent Hindret d’Orléans, pour l’endormir[3]. »

Ce prince aimait beaucoup la musique et la cultivait ; il passe même pour avoir composé des pièces musicales en assez grand nombre :

« Si tôt que l’on étoit revenu, on alloit chez la Reine… L’on avoit règlement trois fois la semaine, le divertissement

  1. C’est le chœur célèbre de Jannequin, la Bataille de Marignan, que l’on appelait la Retraite ou la Défaite des Suisses et aussi la Guerre.
  2. Galanteries des rois de France. Weckerlin, qui cite ce passage de Sauval, ajoute : « Dans la chanson de Jannequin, les Suisses mis en scène, ne disent pas : Tout est perdu, mais bien : Tout est verlore, et y ajoutant Bigott ! un gros juron. »
  3. Journal de Jean Héroard sur l’enfance et la jeunesse de Louis XIII (1601-1628). Extrait des manuscrits originaux et publié avec l’autorisation de M. le ministre de l’Instruction publique, par M. Eud. Soulié et Ed. Barthélémy, Paris, Didot, 1868, t. I. p. 62.