Page:Grillet - Les ancêtres du violon et du violoncelle, 1901,T2.djvu/67

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Notre grand poète mourut quelques jours après, et Lully en profita pour obtenir, le 30 avril suivant, une nouvelle ordonnance qui ne permettait plus aux comédiens que d’avoir seulement deux voix et six violons[1], ce qui causa de nombreuses difficultés entre la Comédie et l’Opéra.

Lully alimenta son théâtre presque à lui seul. Les nombreux ouvrages qu’il y fit représenter sont restés au répertoire pendant près d’un siècle et n’ont commencé à quitter l’affiche qu’après l’arrivée de Rameau.

Parlant de lui et de ses opéras, Titon du Tillel dit :

« Les personnes de distinction et le peuple chantoient la plupart des airs de ses opéras… On dit que Lully étoit charmé de les entendre chanter sur le Pont-Neuf et aux coins des rues avec des couplets de paroles différentes de celles de l’opéra ; et comme il étoit d’une humeur très plaisante, il faisoit arrêter quelquefois son carosse et appeloit le chanteur et le joueur de violon pour lui donner le mouvement juste de l’air qu’ils exéculoient[2]. »

Pendant une grave maladie que Lully fit en 1686, le prince de Conti le visitait souvent, il venait de terminer son opéra

  1. Nous lisons dans la Musique à la Comédie Française, par Jules Bonnassies :

    « c’est dans la Comédie des Proverbes de Montluc (1616) que nous trouvons le premier témoin, dans un théâtre, d’un orchestre composé de violons… Perrault, dans le Parallèle des anciens et des modernes, dit que, en 1629, la symphonie dans les théâtres est d’une flûte et d’un tambour ou de deux méchants violons. »

    « Chappuzeau est le seul de qui nous tenions quelques détails précis touchant la place des violons au temps de Molière : « Cy-devant, écrit-il en 1613, on les plaçoit ou derrière le théâtre, ou sur les aisles, ou dans un retranchement entre le théâtre et le parterre, comme en une forme de parquet ; — cette dernière place est celle que leur assigne Israël Silvestre dans son estampe de la représentation de la Princesse d’Elide, à Versailles, en 1664 ; — depuis peu on les met dans une des loges du fond, d’où ils font plus de bruit que de tout autre lieu où on les pourroit placer. Il est bon qu’ils sçachent par cœur les deux derniers vers de l’acte, pour reprendre prontement la symphonie sans attendre qu’on leur crie ; Jouez, ce qui arrive souvent. » Par cette loge du fond, Chappuzeau veut dire sans doute du fond de la salle. »

    L’orchestre du Théâtre-Français, qui comptait 12 exécutants en 1758, 18 en 1764, 34 en 1792 ; 28 en 1815 et 1830, fut supprimé en 1871. Depuis cette époque, la symphonie se tient « sur les aisles », c’est-à-dire dans les coulisses, où très habilement dirigée par M. Laurent Léon.

  2. Le Parnasse françois.