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Page:Gros - Les explorateurs contemporains des régions polaires, 1881.djvu/58

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la nuit d′hiver du polhem.

opaques, un développement extraordinaire. Certaines algues ainsi récoltées, qui s’étaient montrées stériles pendant l’été, arrivaient à la fin de l’hiver à atteindre leur plus haut degré de fructification.

Le savant naturaliste se trouva en outre en face de deux observations qui mirent le comble à son étonnement. Constamment la sonde et la drague ramenaient des animaux marins invertébrés qui vivaient ainsi sans lumière dans une eau glacée. Le docteur Enival émit la pensée qu’il y avait peut-être dans les profondeurs de ces mers quelque source inconnue de lumière et il fit une expérience concluante. Des plaques sensibilisées furent descendues à de grandes profondeurs, et on les y laissa séjourner pendant vingt-quatre heures et même davantage. Quand on les retira, elles ne présentaient pas la moindre altération, et l’on put en conclure que l’obscurité était absolue dans ces eaux où cependant se trouvaient en grand nombre de petits animaux vivants.

La découverte la plus importante qui fut faite, au point de vue de l’histoire naturelle, fut celle d’une quantité prodigieuse d’êtres animés qui vivaient à l’air libre, à une température qui dépassait souvent 10 degrés au-dessous de zéro.

Déjà cette remarque avait été faite par le lieutenant Bellot dont nous avons raconté la fin tragique. Pendant l’expédition dans laquelle il a perdu la vie, il remarqua qu’au bord des plages, pendant la durée de la nuit polaire, ses pieds laissaient sur la neige des empreintes lumineuses d’un effet très singulier.