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Page:Gros - Les explorateurs contemporains des régions polaires, 1881.djvu/77

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les explorateurs contemporains.

ces malheureux désespérés. Il s’efforça donc de leur rendre le courage avec l’espérance.

— Mes amis, leur dit-il, nous avons deux embarcations avec lesquelles nous pouvons tenter de rejoindre la terre. Là, nos Esquimaux sont pour ainsi dire dans leur patrie et sur leur terrain. Ils chasseront et pêcheront ; nos vivres, ainsi renouvelés sans cesse, nous permettront d’attendre soit l’arrivée de navires pêcheurs, soit celle d’une expédition qui ne peut manquer de venir à votre recherche.

Ce plan était plein de sagesse, malheureusement il fut impossible de le mettre en pratique.

Quand on mit les canots à la mer, au lieu de suivre les conseils de leur chef et d’obéir à ses ordres, chacun voulut y descendre et y entasser des provisions. L’une des barques fut sur le point de couler à fond. Le capitaine Tyson comprit que toute tentative d’aller à terre était devenue inutile et il se résigna à installer son campement et celui de ses hommes sur le glaçon que la débâcle continuait à entraîner dans la direction du sud.

C’est là, sur ce champ de glace, que ces hommes grossiers, indisciplinés, armés de pistolets et de fusils, tandis que leur chef était sans armes, étaient appelés à vivre et à attendre les évènements jusqu’à la catastrophe finale. Là pourtant, vivaient deux femmes et un enfant à la mamelle. Pendant l’hivernage du Polaris, la femme de Joë avait mis au monde un petit garçon qu’on avait baptisé Charles Polaris et le pauvre petit, peu soucieux des dangers qui