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Page:Gros - Les explorateurs contemporains des régions polaires, 1881.djvu/78

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le drame du polaris.

l’entouraient, se pendait ardemment au sein de sa mère.

L’espèce d’îlot de glace sur lequel se trouvaient les naufragés était formé de glace d’eau douce, ce qui indiquait qu’il avait glissé dans la mer, en suivant, emporté par son propre poids, la déclivité d’une montagne du rivage. Il affectait à peu près une forme ronde, et dans le principe, il n’avait pas moins de deux kilomètres de diamètre. Il s’en allait entraîné par le courant et se heurtant sans cesse contre d’autres champs de glace, épaves de la débâcle.

La première difficulté que devait rencontrer le chef de l’expédition, c’était d’obtenir de ses hommes l’économie si nécessaire des vivres dont on était maître. Le capitaine Tyson, réduit aux seules ressources de son éloquence, n’arrivait qu’à grand’peine à leur démontrer que toutes leurs chances de salut reposaient sur la conservation plus ou moins longue de ces modestes ressources.

Un jour quelques mutins se jetèrent sur les provisions en réserve.

— Nous sommes irrévocablement perdus, disaient-ils, à quoi sert de nous imposer d’inutiles privations. Puisqu’il faut mourir, mourons en jouissant.

— Malheureux ! leur disait Tyson, que ferez-vous, quand il ne vous restera rien à vous mettre sous la dent ; quand vous sentirez toutes les horreurs de La famine ?

— Hé bien ! répondirent ces êtres féroces, nous