évoluer leurs conceptions si rapidement, de ce Bayon à cet Angkor Vat, tant il y a de divergences profondes dans l’essence même de l’inspiration qui présida à l’édification de chacun d’eux.
Angkor Vat est un prodige manuel. C’est la perfection de la main-d’œuvre, le règne de la volonté, le domaine du rinceau, du pétale, de la broderie lapidaire. La ligne est reine tyrannique, le plan glacial ; la pierre, la rigide pierre, déesse. La frénésie de décorer, la volonté d’éblouir éclatent sur chaque bloc.
Au Bayon, rien de tout cela. La matière est fruste, inhabilement employée. Le plan est confus, pittoresque, maladroit au point que des galeries longent des assises à quatre-vingts centimètres. La décoration est sobre, large, colorée dans son exécution. Aux bas-reliefs, presque pas de scènes légendaires — mais de la vie, des hommes, des épisodes familiers. On ne trouve pas une préoccupation mesquine. Au contraire de ce qu’on remarque à Angkor Vat, lorsqu’ils édifièrent le Bayon, les artistes ne laissèrent pas aux pierres le soin de prier les Dieux, — ils prièrent eux-mêmes. Ils n’eurent qu’une hâte, semble-t-il, celle d’achever