Page:Groslier - À l’ombre d’Angkor, 1916.djvu/46

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Il y a mille trois cents ans, sur ce même fleuve et se rendant au temple où je me rends, peut-être en cet endroit, un prince arrêta son convoi. Les sampans et leurs ornements, étaient exactement semblables à ceux-ci. Une des femmes de sa suite, la glace ronde en mains, fit sans doute sa toilette. Le type était le même ; le pagne, le geste —semblables. Peut-être, au ciel, comme ce soir, il courait des nuages menaçants. Les vieilles sculptures nous montrent, aux fenêtres, des rideaux pareils. Et peut-être encore que, pour se préserver de la fraîcheur des soirs, la princesse antique avait mis sur sa poitrine, que les femmes alors gardaient nue, la même écharpe orange.

Entre trois pierres, comme au temps d’Angkor, les coolies allument le feu. Nus, un court sampot aux reins, habitants de ce haut Cambodge où notre civilisation n’arrive pas encore, parlant la vieille langue, je les reconnaissais pour les avoir vus sur les bas-reliefs avec les mêmes couteaux et les mêmes marmites à cuire le riz.

Ainsi, à chaque instant, on se convainc que rien n’est changé dans ce peuple. Les charrettes ont le même nombre de rayons aux roues, les cases de bois