Page:Groslier - À l’ombre d’Angkor, 1916.djvu/62

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surélevant, des blocs de pierres monstrueuses encerclés de lianes, blanches comme des coulées de cire, font des escarpements à pic. Des assises taillées à même le flanc de la montagne succèdent à des assises en blocs rapportés ; Des gradins creusés au ciseau se continuent par des pentes surélevées. Il coule de partout des torrents ou des filets d’eau. On distingue dans l’humus, des traces et des fientes de grands fauves. Des singes hurlent dans les arbres.

L’ascension dura trois heures et le brouillard matinal se refermait sous mes pieds. C’est en vain que je levais les yeux. Devant moi, la roche grise dressait ses murailles. Les arbres immobiles formaient un dôme dans l’ombre duquel brillaient leurs troncs blancs. Et ce dôme toujours se reformant, et cette roche toujours dressée, et derrière moi, ce brouillard toujours refermé —j’avais l’impression de monter hors du monde.

Nous avons, de nos jours, la poudre et des machines pour percer les montagnes. Les Khmers avaient leur ciseau et leurs mains. Et s’il est vrai que l’aigle et l’éléphant vivent des siècles, quel .spectacle, quelle ruée d’édificateurs durent voir les vieux solitaires dont la région est peuplée !