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Page:Grotius - Le Droit de la guerre et de la paix, tome premier, trad. Pradier-Fodéré, 1867.djvu/165

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seulement du droit humain, mais aussi du droit divin volontaire, qui ne prescrit pas ou ne prohibe pas des choses obligatoires ou illicites par elles-mêmes et de leur propre nature, mais qui rend ces choses illicites en les interdisant, et d’obligation en les commandant[1].


    ni par Dieu lui-même, car Dieu ne peut changer les rapports des choses. L’homme est initié au droit naturel, d’un côté par la raison qui lui révèle les rapports des choses, et le met à même de reconnaître si certains actes sont conformes à sa nature raisonnable, de l’autre coté par l’étude de ce qui est observé du consentement unanime des nations civilisées. Grotius donne pour sanction au droit naturel les remords de la conscience, les peines et les récompenses de l’autre vie (voir dans le Précis du droit des gens de Martens, la note excellente de M. Ch. Vergé, t. Ier, 2e édit., p. 33). Ainsi donc, tandis que les anciens sophistes niaient que entre le bien et le mal il y eût une distinction réelle, tandis que quelques théologiens modernes prétendaient que ces distinctions dépendent de la volonté arbitraire de Dieu, de même que dans un autre sens certains publicistes, tels que Hobbes, les attribuaient à l’institution positive du législateur civil ; selon Grotius, au contraire, la conscience elle-même impose des lois, puisqu’elle autorise certaines actions, tandis qu’elle en condamne d’autres, suivant que ces actions sont conformes ou opposées à la nature de l’homme considéré comme un être moral ou social.


    Wheaton fait remarquer qu’il est évident que, dans ce passage, Grotius entend par droit naturel les règles de justice qui doivent diriger les actions des hommes, considérés comme des êtres moraux et responsables. Mais il ajoute qu’il serait plus juste d’appeler ce droit loi de Dieu, ou loi divine, puisque c’est Dieu qui l’a prescrite à l’homme, et qu’elle lui est révélée par la raison ou par les saintes Écritures. (Wheaton, Éléments du droit international, édit. 1858, t. I, p. 2 et 3.) — Sur les controverses relatives au sens de l’expression droit naturel, et à l’existence de ce droit ; sur la définition, le caractère et les limites du droit naturel, voir Vattel, le Droit des gens, etc., édit. Guillaumin, t. I, p. 78 et suiv., 82 et suiv.

  1. Ce passage inspire à Barbeyrac les réflexions suivantes : « L’auteur, dit-il, suppose ici que l’on serait dans quelque obligation de faire ou de ne pas faire certaines choses, quand même on n’aurait à répondre de sa conduite devant personne…L’on voit encore aujourd’hui quelques auteurs, d’ailleurs très-judicieux et nullement esclaves des préjugés de l’École, s’opiniâtrer à soutenir que les règles du droit naturel et de la morale, imposent par elles-mêmes une nécessité indispensable de les suivre