Page:Groulx - Chez nos ancêtres, 1920.djvu/48

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vrais fils de normands : à bonne mesure, mesure et demie.

Au besoin ils savaient se détourner des actions et de la gloriole des actions individuelles, pour songer à la beauté plus grande des actes qui rejaillissent sur tous. C’est un héritage de charité sociale qu’ils tiennent de toute leur histoire. Au début de la guerre suprême, des enfants de treize ans, des vieillards de quatre-vingts iront s’offrir d’eux-mêmes à M. de Montcalm. Nos ancêtres de 1755 n’avaient pas perdu mémoire du sacrifice chevaleresque de Dollard, lequel n’était vieux pour eux que de quatre-vingt-quinze ans. Après Dollard, d’autres continuèrent de mettre dans leurs actes des préoccupations qui les dépassaient, qui embrassaient la communauté des foyers et de la patrie nouvelle. Quand Mademoiselle de Verchères, une enfant de quatorze ans, décide de mourir et d’être « hachée en mille pièces » plutôt que de laisser tomber le fort paternel, elle se détermine, par un sentiment de vaillance chevaleresque, mais aussi par un motif de solidarité patriotique. Elle en adjure ses jeunes frères, par ces paroles où passe l’instinct de la vieille race : « Battons-nous jusqu’à la mort pour notre patrie et pour la religion. Souvenez-vous des leçons que mon père nous a si souvent données que des gentilshommes ne sont nés que pour verser leur sang pour le service de Dieu et du roi ». Elle se tourne