Page:Groulx - Chez nos ancêtres, 1920.djvu/60

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suite il multiplie les conseils à sa femme et à chacun de ses enfants. Ces conseils sont des plus élevés, conseils d’union, de désintéressement, de probité, de fidélité à Dieu. Et j’y cueille entre autres ce passage qui serait aujourd’hui encore d’une si vivante actualité : « Il faut faire ce que l’on peut pour amasser (du bien), ne négliger aucune occasion, mais que ce soit toujours sans préjudice de notre conscience et de notre honneur. Plutôt vivre pauvre, plutôt mourir que de rien faire contre l’ordre de Dieu ».[1]

Les Adieux du Grand-Père Boucher ont été conservés pieusement par sa nombreuse descendance. Une coutume touchante voulait encore, il n’y a pas bien des années, que ce document vénérable fût lu en entier, annuellement, en famille et à genoux.

« Plutôt vivre pauvre, plutôt mourir que de rien faire contre l’ordre de Dieu », avait dit le vétéran de la Nouvelle-France. Parole profonde de sens et de vérité. Tous tant que nous sommes, nous cherchons parfois le secret de notre étonnante vitalité depuis trois cents ans, le secret de notre survivance malgré tant de tempêtes. Le secret, nous le tenons. Les peuples forts, les peuples durables ne le deviennent point par les seules forces matérielles, parce que d’heureuses circonstances favorisent un moment de leur histoire et les font monter vers l’opulence. Leurs

  1. R. P. Louis Lalande, Histoire de Boucherville, p. 69.