entraîné peu à peu par le besoin de se fortifier dans son mouvement de recul, il a fait accueil aux théories du beau-frère. Oh ! sans doute, il a eu soin de les désinfecter du « Duffinisme » ; du moins il s’en flatte. Mais le fond de la doctrine y est bel et bien et c’est elle qui tient l’esprit du gentilhomme.
Un jour, à la Chambre, un jeune député ontarien très proche du ministère, esprit modéré et bon camarade, est venu s’asseoir près de Lantagnac.
— Ainsi donc, a-t-il dit, vous serez, vous aussi, de cette manifestation ?
— Ne serait-ce pas mon droit et même mon devoir ? lui a répondu le député de Russell,
— Tout cela, c’est grand dommage, a repris l’Ontarien, branlant la tête, d’un air fort contrarié. Et il a ajouté avec une grande apparence de sincérité :
— Vous voulez ennuyer le ministère ? Pour cela vous réussirez. Mais aussi, me permettez-vous de le dire ? ce fracas ne fera de bien ni à votre cause ni au pays. Vous ne savez pas jusqu’à quel point, mon cher collègue, vos amis vont paralyser les efforts sincères des hommes de paix.
Là-dessus le jeune député s’était esquivé, laissant Lantagnac à ses réflexions. — Vient-il de lui-même, celui-là ? Est-il sincère ? ou est-ce encore un envoyé interlope du ministère ? s’était demandé le député de Russell.