Page:Groulx - L'appel de la race, 1923.djvu/276

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
276
L'APPEL DE LA RACE

où déjà s’exprimait, ardente et belle, une promesse d’orateur. À ce moment pourtant, Lantagnac qui brûlait de tout apprendre, ne put retenir sa curiosité :

— C’en fut à peu près fini, dis-tu ? À peu près ?… D’autres causes ont donc agi sur toi ?

— L’autre jour, reprit Wolfred, plus ému, j’ai suivi un pèlerinage de l’Action française de Montréal au Long-Sault, au pays de Dollard. Tu te souviens de ce Dollard de Delfosse qu’un jour tu accrochas au mur de ma chambre. En ce temps-là, tu le devines, je n’y prêtai qu’assez peu d’attention. Avec le temps toutefois et selon les progrès de mon évolution, ce suprême sonneur de charges m’obséda comme un modèle impérieux, comme un entraîneur irrésistible. Donc, l’autre jour, tu l’as sans doute lu dans les journaux, un groupe de patriotes s’en allaient inaugurer, aux lieux mêmes du combat de 1660, un monument au sublime héros de la Nouvelle-France. Je les suivis. J’ai trouvé là un site comme je les aime ; un vrai site barrésien : un lieu retiré, enclos, fait pour la méditation, se relevant vers le fond par une colline inspirée, puis s’abaissant vers la nappe solennelle d’un fleuve en marche. L’esprit trop plein de mes méditations, je m’écartai de la foule. Je gravis les hauts coteaux. J’allai m’asseoir sur l’herbe, face au Long-Sault, sous les vieux ombrages. Là le vent m’apportait, avec la rumeur des eaux, quelques-unes des phrases les plus vibrantes des orateurs. Cette éloquence claquait autour de