Page:Groulx - Louis Riel et les événements de la Rivière-Rouge en 1869-1870, 1944.djvu/15

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vernement provisoire, en l’absence de toute autorité effective, quelle n’était pas la culpabilité de ce parti canadien qui, même avant la cession du Nord-Ouest au Canada, avait entretenu, contre le gouvernement légitime de la Baie d’Hudson, une insurrection larvée et pris les armes contre le gouvernement provisoire, reconnu officiellement par la convention des délégués du pays ? « Je ne veux incriminer personne », écrivait Mgr Taché au gouverneur-général, Sir John Young, « mais si les plus coupables et les plus rebelles devaient être punis, le châtiment pourrait bien être infligé à quelques-uns de ceux qu’on exalte comme les champions de la loyauté, du devoir et de l’honneur ». Dans sa seconde brochure sur l’Amnistie, l’archevêque de Saint-Boniface reprendra le même argument : « On ne doit pas plus punir ceux qui ont occupé le fort Garry d’en bas, que ceux qui ont occupé le fort Garry d’en haut, pas plus ceux qui ont causé la mort de Scott que ceux qui ont causé la mort de Parisien. » L’archevêque aurait pu ajouter : et la mort de Goulet. Que dire des mauvais traitements qu’au lendemain des troubles, les volontaires licenciés et les nouveaux venus au Manitoba, vont infliger aux Métis français ? Dans une lettre « confidentielle » du 9 octobre 1871, à Sir John-A. MacDonald, le lieutenant-gouverneur a dénoncé sans ménagement ces méfaits. Ceux des Métis qui osent s’aventurer dans Winnipeg, écrit Archibald, « ont été tellement battus et ont subi tellement d’outrages qu’ils croient vivre dans un état d’esclavage. Ils disent que la haine de ces gens est pour eux un joug si insupportable qu’ils s’y soustrairaient volontiers à aucun prix. »

D’ailleurs, amnistiés, Riel et ses partisans ne l’avaient-ils pas été par le parlement manitobain, plus courageux que le gouvernement d’Ottawa ? À la session de 1872, au lendemain de l’alarme fénienne, le lieutenant-gouverneur Archibald convoquait les Chambres. Pour la défense du pays il avait osé accepter la collaboration des Métis français, et en particulier de Riel et de ses principaux lieutenants. Violemment pris à partie, jusque dans l’Ontario, Archibald désirait faire approuver sa politique. Il n’en fait pas mystère : « j’ai eu soin, en convoquant la Chambre »,