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mes mémoires

Lettre de Georges Pelletier, au sujet de cette démission
(Copie dactylographiée d’après l’original)

Montréal, 25 mai 1943.

M. le Dr Eugène Tremblay, chirurgien,
Chicoutimi.

Confidentielle

Cher monsieur,

Le Service du tirage me remet une lettre de vous, du 22 mai, où vous dites que « comme les gens qui ont réussi à mettre M. Bourassa hors du journal ont complètement changé l’orientation dudit journal, etc., etc. »

Je crois que vous êtes sous une très fausse impression. En fait, M. Bourassa n’a jamais été mis hors du journal. Il était propriétaire de la majorité plus une des actions de contrôle. Il pouvait mettre dehors tous les rédacteurs. Seulement, depuis qu’il était entré de nouveau dans la politique, en 1925, à maintes reprises il avait parlé de se retirer du journal, afin de ne pas influencer celui-ci par sa présence au Parlement et de rendre Le Devoir responsable des attitudes que lui, M. Bourassa, prenait, ou de rendre M. Bourassa responsable des attitudes que Le Devoir pouvait prendre.

À ma demande personnelle ainsi qu’à celle de notre Conseil d’administration, M. Bourassa a consenti à rester, d’une année à l’autre, jusqu’en 1932. En 1932, la situation financière du journal était très mauvaise et M. Bourassa, député au Parlement, ne pouvait pas prendre l’initiative d’un remaniement de l’organisation financière du journal, ce qui aurait exigé tout son temps, et ce qui était une entreprise considérable pour un homme alors âgé de 62 ans, dont la santé n’était pas très bonne.

En mai 1932, M. Bourassa m’a lui-même remis sa démission. De toutes façons, et pendant des semaines, j’ai insisté pour qu’il gardât le titre de directeur du journal, ce qu’il ne consentit pas à faire, écrasé qu’il était de besogne à Ottawa. Ajoutons qu’il ne se sentait pas la force voulue pour reprendre l’organisation financière du Devoir.

En août 1932, malgré toutes mes insistances jusque-là, M. Bourassa fit convoquer le Conseil d’administration, expliqua sa