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Page:Groulx - Mes mémoires tome II, 1971.djvu/228

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mes mémoires

tinu avec lui et, à maintes reprises, il a exprimé personnellement sa satisfaction de l’attitude générale du journal. Nous avons toujours fait écho à ses discours et à ses conférences. Pour ma part, on m’a demandé de le présenter au public de l’une de ses grandes conférences et c’est lui-même qui a suggéré mon nom. Croyez-vous que si j’avais contribué à le mettre hors du journal, il aurait accepté que je le présentasse ? Si vous le croyez, vous ne le connaissez pas. Nous sommes, nous du Devoir et M. Bourassa, en relations cordiales. Nous n’avons jamais voulu faire quoi que ce soit qui pût lui déplaire du point de vue personnel. S’il y a eu de très légères divergences d’opinion entre lui et nous, ce fut accidentellement et sur des questions de détails. Nos jugements, quant aux hommes politiques, il les partage dans l’ensemble. Nos jugements sur la politique de guerre ne sont pas loin d’être les siens. Encore ces jours derniers, j’ai eu l’occasion de causer longuement avec lui. Si j’avais contribué à le mettre hors du journal, comme vous le croyez, est-ce que vous pensez qu’il me laisserait entrer chez lui ? À plusieurs reprises, il m’a même invité à dîner chez lui et je l’ai invité à dîner avec moi. Croyez-vous que cela se ferait entre gens qui se seraient fait une lutte quelconque au journal ? Je vous laisse à répondre.

M. Bourassa est resté l’ami du journal et nous restons de ses amis. Il n’y a pas encore très longtemps, avant la mort de M. Ernest Lapointe, comme celui-ci nous reprochait notre attitude à l’endroit de la guerre, je me suis contenté de lui répondre : « Mon cher Lapointe, Le Devoir a toujours suivi la ligne politique de M. Bourassa sur la question impériale et il a toujours tiré dans cette direction. Il continue et il continuera de tirer dans cette direction, même si certains de nos amis estiment que cela peut les atteindre. Tant pis pour eux, ils n’ont qu’à ne pas passer dans la ligne de tir ! » Et M. Lapointe a admis, dans une lettre personnelle, que nous n’avions pas changé l’orientation du journal, du point de vue participation aux guerres.

Lorsque vous parlez du Devoir comme le journal « le plus créchard de la province », vous faites sans doute allusion au fait que, sous le régime Duplessis, nous avions accepté des contrats d’imprimerie du gouvernement québécois. Pourquoi pas ? Nous sommes contribuables, nous avons payé des dizaines de mille dollars au gouvernement de Québec, de 1910 à 1936, et nous n’aurions pas eu le droit d’accepter des contrats d’impressions à des prix raisonnables, et sur soumission ? Allons donc ! D’autant plus que nous n’avons jamais fait plus de 10 à 15 %