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Page:Groulx - Mes mémoires tome II, 1971.djvu/335

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quatrième volume 1920-1928

Quel besoin n’a pas la jeunesse de grandir dans la connaissance du passé ! Nous ne sommes point des bâtisseurs sur terre rase, mais les continuateurs d’un édifice commencé. Ouvriers d’une relève, il nous faut savoir à quels labeurs accorder le nôtre, quelle pensée maîtresse a guidé les vieux architectes.

Dans le même numéro de la revue, le président de la Société historique de Montréal, M. Victor Morin, donne quelques renseignements sur la « Semaine » ; il y insère la liste des principaux semainiers, professeurs et conférenciers. Aux séances d’étude de l’avant-midi et de l’après-midi, s’ajouteront les séances d’apparat du soir. Pour celles-ci, quelques-uns des plus grands noms de la vie politique et religieuse ont été mobilisés. La « Semaine » s’ouvre. En dépit de quelques sceptiques, tout de suite, des foules envahissent la salle académique de la Bibliothèque Saint-Sulpice, alors le rendez-vous des manifestations intellectuelles. On m’a désigné pour une conférence du soir. J’ai pris pour sujet : « L’histoire et la vie nationale ». Pour des raisons que je donnerai tout à l’heure, ma conférence n’apparaît point dans le volume-souvenir. Je l’ai reproduite dans Dix ans d’Action française. Je reviens, comme bien l’on pense, sur le rôle de l’histoire dans la vie nationale. D’où vient, à une nation, me suis-je demandé, son principe vital ? Point de la discipline religieuse, pour importante qu’en soit la fonction ; point non plus de l’État, ni de quelque sourd instinct, ni de certaines énergies morales des institutions, mais bien plutôt de ce que j’appelle « un idéal organisateur », entendons les raisons de vivre d’un groupe humain : foi en son être, foi en sa civilisation. Idéal, principe de vie, dont les Canadiens auraient pris conscience après 1760. Mais cet idéal, en quelle formule le définir ? Ne subit-il aucun obscurcissement, aucune évolution ? Il va se clarifiant, se fortifiant jusqu’en 1840. Il s’éclaire, se redresse après la crise. Il s’abat de nouveau après 1867. Retombée de la vie nationale que je décris par une analogie passablement grandiloquente :