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troisième volume 1920-1928

moins de cinq ans, l’Action française aura payé son immeuble acheté au prix de $22,000. Éditrice, la Librairie fonde sa Bibliothèque d’Action française, marque de commerce, en même temps que recueil de ses éditions. Elle possède son service de librairie et aussi son « Courrier de librairie », ce dernier publié, chaque mois, dans la revue, et qui annonce la mise en vente des ouvrages de valeur alors plus spécialement recherchés par les intellectuels. Pour accommoder sa clientèle, l’Action française se donne même un service de reliure. Entreprises multiples où cependant nous prenons garde de nous égarer. Dans L’Action française (X : 126), je définis le rôle assigné chez nous à la Librairie : « L’Action française, écrivais-je, est avant tout une œuvre d’action et de défense nationales par le moyen de la propagande intellectuelle. Pour soutenir l’effort de la revue, nous avons dû créer à côté des œuvres auxiliaires. De là notre librairie et notre service de librairie. Mais en développant chacune de ces œuvres auxiliaires, nous voulons qu’elles s’inspirent du caractère de l’œuvre principale ; et c’est en somme par des œuvres d’action française que nous avons décidé de soutenir L’Action française. Le commerce pour lui-même, sans égard à la nature de la marchandise, nous a paru indigne d’une entreprise comme la nôtre. C’est pourquoi, dans notre librairie, la première place est faite aux volumes de la Bibliothèque de l’Action française qui prolonge, en somme, la propagande de la revue ; la seconde place appartient aux Canadiana de grande valeur ; un troisième rayon va toujours s’élargissant où seront rangés de plus en plus les ouvrages de la littérature de France, ouvrages de grand mérite que la critique aura signalés… » Napoléon Lafortune, aidé d’une secrétaire et d’un commis, anime tout de son infatigable activité. L’humeur souvent malcommode comme tous les grands nerveux, déplaisant parfois à la clientèle et même aux directeurs, il m’imposera d’arrondir les angles, d’amortir les chocs. Et l’on devine que l’expansion rapide et considérable de l’œuvre n’est pas faite pour amoindrir ma tâche. Mes collègues contraignent le directeur de la revue à se constituer directeur moral de toute l’entreprise. Deux jours par semaine, les mardi et vendredi après-midi, je me transporte à mon bureau de la rue Saint-Denis. J’y expédie les affaires pressantes ; je fournis le gérant de conseils ou de directives et je reçois nos amis de passage, désireux de s’entretenir