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mes mémoires
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Sur ces mots, M. le vicomte de Fontenay s’était levé. Il me tendit la main. L’audience avait duré une heure. Je remerciai M. le Vicomte de sa grande bienveillance à notre égard et lui promis de faire parvenir ses conseils et avertissements à qui de droit.

Chez le Pape

Une audience manquée ! C’est bien la mésaventure qui m’arrive le 5 mars. Par erreur, ou plutôt faille dans mes souvenirs, j’ai interverti l’ordre de mes rencontres ou audiences. C’est par le Vatican que j’ai commencé et c’est par l’ambassade de France que j’ai terminé. À la vérité, je me suis promis peu de chose de mon audience privée près du Saint-Père. Je ne m’imagine guère Pie XI portant beaucoup d’attention aux propos d’un petit professeur d’histoire du Canada, en l’humble province de Québec. Et cette audience n’allait pas sans m’apporter quelque trouble intérieur. On m’avait dit l’homme tout d’une pièce, posant plus de questions qu’il n’attendait de réponses et fort expéditif en toute affaire. Mgr Perrin, naguère directeur du Collège canadien à Rome, mais encore en la Ville éternelle, me l’a décrit, la veille, extrêmement autoritaire, exigeant pour tous ses subordonnés. Pie XI régnait. Les cardinaux, même de la Curie, ne voyaient venir qu’avec crainte et tremblement leur audience de chaque quinzaine ; « ils préparent leurs rapports avec le tremblement d’un étudiant, la veille de ses examens », m’avait encore dit Mgr Perrin. Ce jour-là donc, je gravis les grands escaliers du Vatican, d’un pied leste, mais avec un cœur que j’aurais souhaité plus solide. Quelles questions me va poser le Saint-Père ? Et comment y répondrai-je ? Un fonctionnaire, tout de rouge habillé, me conduit dans une pièce attenante au cabinet de travail du Pape. Et j’attends, j’attends… J’attends plus d’une heure. J’attends plus longtemps que le poète de la chanson. Le plus fâcheux, c’est que l’heure de mon audience est passée. Le Monseigneur qui voit à donner son tour aux rares élus dont je suis, m’apprend préci-