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mes mémoires

cours pour 24 juin ou 1er juillet, une simple balançoire à l’usage du plus naïf des deux contractants.

Enfin et c’est sur quoi elle insiste, la jeune génération est d’accord pour condamner un régime économique en train de préparer à sa nationalité le pire des esclavages…

Mais un redressement restait-il possible ? Oui, répondais-je, à la condition toutefois d’une solide et décisive éducation nationale. Et pour cette éducation j’indiquais les ressources toujours à notre portée. En tout premier lieu, notre catholicisme :

À des jeunes hommes et à des jeunes filles épris d’un idéal absolu, ambitieux de pousser jusqu’à l’ultime développement leur personnalité, il serait montré que leur naissance dans un milieu et dans la foi catholiques leur vaut cet incomparable privilège d’avoir, devant les yeux, pour idéal moral, l’infinie perfection du Christ, et, pour terme de leur développement spirituel, cette élévation de personnalité qui peut faire d’eux, s’ils le veulent, des surhommes et des dieux.

En second lieu, je faisais voir les ressources de la culture originelle :

Car, enfin, celui-là qui a l’honneur privilégié d’être un fils intellectuel du pays de Racine et de Pascal, et qui est par surcroît le fils d’un milieu catholique, n’a peut-être pas le droit de se croire supérieur à tout autre, mais n’a-t-il pas le devoir de ne se croire inférieur à personne ?

Enfin, et pour conclure, venaient quelques paroles sévères, mais paroles aussi de réconfort. Jamais, en effet, la sévérité de mes diagnostics n’a pu m’arracher mon incurable optimisme, pas même en ces dures années 1930-1940 :

Une chose est certaine : nous ne pouvons plus vivre comme nous avons fait. Le moment d’un choix décisif est venu. Ou bien nous continuerons à vivre dans le désordre, les velléités paresseuses, le laisser-aller où, ces dernières années, nous avons moins vécu que sombré ; et alors ce sera la fin, à brève échéance, d’un petit peuple qui aurait pu, en cette Amérique, et pour le profit d’un splendide idéal, gagner une sublime gageure ; ou bien, et c’est, malgré tout, notre espoir, nous nous redresserons ; aux obstacles mieux dévoilés, nous mesurerons exactement nos volontés ; de nos périls, de notre destinée, nous prendrons l’idée claire, l’idée courageuse qu’il faut prendre ; nous rassemblerons