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mes mémoires

Longtemps ce projet me hantera l’esprit. En 1947, fin de juin, j’écris pour le journal Notre Temps, un article sur « Notre problème religieux ». L’article ne tombe pas tout à fait à plat. Le Dr Frappier, de l’Institut de microbiologie, m’écrit un mot de félicitation, pour me dire : « Un coup de barre s’impose. Une évolution également de haut en bas ! » Le 22 août 1947, je lui fais part d’un autre projet qui me tient à cœur :

J’eusse beaucoup aimé causer avec vous de tout ce problème [problème religieux]. Pas plus que vous je ne me cache qu’il intéresse au plus haut point notre monde universitaire, et en particulier, nos professeurs. J’aurais voulu surtout vous entretenir d’un projet qui me hante l’esprit depuis longtemps : projet de réunions annuelles d’universitaires, comme il s’en fait, pendant les vacances, en d’autres pays, réunions où l’on cherche, pendant deux ou trois jours, en même temps que le raffermissement de sa foi, les meilleurs moyens de faire œuvre, dans son milieu d’universitaires catholiques. Ne vous semble-t-il pas que le souci religieux nous préoccupe trop peu dans notre enseignement et dans notre comportement à l’égard des étudiants ? J’en dirais autant du sens de nos responsabilités à l’égard de notre peuple. Je me demande même si, abstraction faite de quelques discours ou formules officiels, discours et formules qui partent des lèvres plus que de l’esprit, nous songeons parfois à ces responsabilités. Universitaires catholiques, c’est là, pour nous, hélas, je le crains, plus une étiquette, une enseigne, qu’une formule de vie… Sans recourir à cette formule [formule de la retraite fermée] qui peut effrayer quelques-uns, le projet d’une réunion préliminaire de quelques professeurs de nos trois universités catholiques et françaises, pour les fins dont je vous parlais tout à l’heure, ce projet serait-il opportun et réalisable ? Je vous donne mon idée, cher monsieur Frappier, pour ce qu’elle vaut. Je ne suis plus à l’âge des grands desseins. Et j’en ai sur le dos plus que je n’en puis porter. Mais je m’en voudrais de ne pas m’ouvrir de ces idées aux hommes de cœur et de foi, tellement il me paraît anormal que nos universités servent si