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huitième volume 1950-1967

parlement impérial ; 3 – la portée de l’attitude de LaFontaine en 1842, n’acceptant l’union des Canadas que sur la base fédérative ; le plus modeste écolier, dis-je, qui aura noté la signification de ces dates historiques, admettra l’évidence d’un effort persistant, victorieux, de notre petit peuple vers une autonomie nationale toujours plus complète, vers l’achèvement de sa personnalité politique. Telle est la courbe ascendante de notre histoire. Elle a ce sens, cette ligne ; ou elle n’en a point. »

Je ne m’arrêtais pas à 1842 : « Au reste, le postulat n’est plus un postulat. L’État français, dans la province de Québec, est devenu depuis 1867, de droit positif, constitutionnel. Fait indéniable sur lequel il ne faut pas se lasser d’éclairer nos fumeuses et débiles cervelles de coloniaux. C’est nous, Canadiens français, qui sommes les principaux responsables de la forme fédérative de l’État canadien. La Confédération a été faite principalement par nous et pour nous. Et ces institutions fédératives, nous les avons exigées, non pas, que je sache, au nom d’intérêts économiques et politiques, mais, au premier chef, au nom de nos intérêts nationaux. Relisez les documents de l’époque : le fait est indiscutable. Autre fait indiscutable : tous nos associés de 1867 ont agréé nos exigences ; le parlement impérial les a pareillement agréées. Je renvoie de nouveau aux paroles de lord Carnarvon que j’ai tant de fois citées : « Le Bas-Canada est jaloux et fier à bon droit de ses coutumes et de ses traditions ancestrales… ; et il n’entrera dans la fédération qu’avec la claire entente qu’il les conservera… » Que veut-on de plus ? Pour quel motif nous a-t-on consenti, en 1867, la résurrection de notre province disparue politiquement depuis 1841 ? À ce tournant d’histoire, quel argument suprême ont brandi, d’autre part, nos chefs politiques pour nous faire accepter le nouveau régime ? D’un côté comme de l’autre, il fut entendu, proclamé, que la Confédération nous remettait chez nous, maîtres de notre province et de sa politique, en état de gouverner nous-mêmes nos destinées ! »

Ainsi se pourrait définir ma pensée politique. Paroles de simple bon sens. Formule à laquelle je me serai accroché. Mais ai-je pressenti l’avenir ? Ai-je prévu qu’une déclaration aussi fondée sur les textes constitutionnels me vaudrait pour jamais, au-