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septième volume 1940-1950

immédiate d’une École normale supérieure à Montréal. » Voici, en effet, ce que le sénateur Dandurand, s’inspirant du Mémoire Dupuy, venait de m’écrire :

Vous ne vous sentez pas le droit de condamner notre système d’enseignement secondaire, notoirement insuffisant, sans en même temps proposer quelque réforme pour son amélioration. Or, la réforme que vous préconisez est dans la fondation à Montréal d’une École normale supérieure qui deviendrait obligatoire pour tous les professeurs de notre enseignement secondaire. Cette réforme, je l’appelle comme vous, de tous mes vœux ; mais, dites-moi, où prendrons-nous les professeurs possédant, à ces hauteurs, les connaissances supérieures et l’art d’enseigner ? Vous me répondrez peut-être : allons les chercher à Paris ; mais je vous pose cette autre question : où prendrez-vous les élèves en état de recevoir cet enseignement ? Pas dans nos collèges, dites-vous, dont nous constatons l’insuffisance et qui continueront de déverser dans la société des milliers de jeunes gens estimés incompétents.

Vous pensez que Stanislas ne pourra donner ses fruits que dans une vingtaine d’années ; vous serez heureux que je vous désabuse sur ce point. Dans sept ou huit ans Stanislas pourra fournir à une École normale supérieure de Montréal des élèves bien formés. Cette École normale, le chanoine Méjecaze en voit la nécessité et il sera heureux, en temps opportun, de contribuer à sa création.

Encore plus inquiet, toujours dans ma lettre du 16 septembre 1938, je faisais observer à mon ami Fréchette :

À mon avis, il serait fort humiliant pour nous d’attendre des Français de France la fondation de notre École normale supérieure. Ce serait tout de bon le retour du colonialisme moral. Il me semble qu’une École normale supérieure, organisée dès maintenant, avec nos élèves et nos professeurs, permettrait à notre enseignement secondaire de gravir, en quelques années, un palier, modeste si l’on veut, mais qui empêcherait tout de même le gaspillage d’une génération d’écoliers et de professeurs. Les vocations d’éducateurs, vous dira-t-on, ne sont pas