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septième volume 1940-1950

sogne, touche aux questions plus qu’il ne les résout. Il se décharge volontiers sur des intermédiaires, sans trop les bien choisir. Pendant de longs mois, je n’entends plus parler de mon projet. Un jour, je ne sais plus qui m’apprend l’existence de l’École : un Franciscain, le Père d’Alcantara, lui a dressé un programme d’étude et elle loge au Séminaire sulpicien de philosophie, sur la Montagne. Un Sulpicien, peu connu et peu préparé à son rôle, en assume la direction. En ses vingt ans d’existence a-t-elle produit des fruits valables ? Elle ne sera pas l’École que j’avais rêvée. Il lui aura manqué, ce semble, une âme et un vrai maître. Toutefois, à mes cours d’histoire, j’ai pu rencontrer quelques-uns de ses élèves. Je pris aussi l’habitude d’en recevoir de petits groupes chez moi. À tout prendre l’École aura jeté, dans nos collèges, quelques esprits fort brillants qui y ont laissé leur empreinte. Mais elle ne paraît pas avoir jamais visé à devenir graduellement une École normale supérieure.

Professionnels et culture classique

Est-il besoin de noter, après cela, l’opportunité d’une conférence sur les études classiques, même en 1948 ? De ces antiques études, combien de novateurs font déjà et depuis longtemps, leur cible préférée ? Ils les jugent anachroniques, aussi vieillottes qu’une lance de légionnaire romain ou qu’une armure de chevalier du Moyen Âge. Les humanités gréco-latines nous isoleraient de la vie ; elles feraient vivre la jeunesse dans un passé depuis longtemps révolu ; elles donneraient le goût des horizons clos, du moisi, du ratatiné ; elles seraient inaptes à former l’homme nouveau, obligé de vivre dans un monde nouveau. Qu’avais-je à répondre à ces objections et à quelques autres ? Ces objections on les pourra trouver, si l’on en a la curiosité, dans ma conférence « Professionnels et culture classique », conférence insérée dans mon volume Pour bâtir. Encore aujourd’hui, s’il me fallait revenir sur le sujet, j’en resterais à peu près sur mes positions d’alors, si même je ne m’y fortifiais. En ces questions d’éducation, comme en bien d’autres, on oublie toujours, ce me semble,