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Pour Qu’on Écrive L’Histoire

par la Grande-Rivière, l’essaim des découvreurs de pays et d’âmes. Cette rumeur qui lui viendra d’un passé aussi profond que celui des premiers temps du Canada, puisque Samuel de Champlain fut son premier explorateur. Là-bas, dans le haut du pays, la vieille Huronie lui rappellera que la terre ontarienne fut, plus que les autres, la terre des martyrs, la terre des sublimes missionnaires qui allaient jusqu’à mourir pour la civilisation du Christ. Le fleuve, les rives de ses lacs depuis Montréal jusqu’à Détroit et depuis le Sault-Sainte-Marie jusqu’au Michigan, lui rendront les noms de La Salle et de Frontenac, de Gallinée et de Dollier de Casson, les noms de Perrot et de Du Lhut, tous pionniers, organisateurs de ce pays qui garde, sans pouvoir jamais l’effacer, son empreinte française.

Nos frères des prairies pourront suivre, eux, d’un bord à l’autre de leur horizon infini, les traces des La Vérendrye. Bien avant que les eût atteints le flot d’immigrants où se sont trouvés leurs persécuteurs, des hommes de leur race avaient déchiré le mystère de la grande plaine ; des missionnaires de leur sang l’avaient préparée à l’accueil de la civilisation. L’histoire de l’Ouest est telle. Ce pays appartient d’abord aux Canadiens de race française. Les ruines des vieux forts français, le pied de milliers de vieilles croix encore subsistant dans le sol, sont les témoins d’un droit.

Franco-Américains, écoutez bien, vous aussi, la réponse du passé, puisqu’il n’est pas un de vos fleuves, peut-être, qui ne vous rende une rumeur française, et que la voix de l’histoire fait retentir jusque sous le Capitole de Washington, la statue d’un héros de votre race.