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Page:Groulx - Notre maître, le passé, 1924.djvu/84

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Notre Maître, Le Passé

« Le grand, fleuve dormait couché dans la savane.
Dans les lointains brumeux passaient en caravanes
De farouches troupeaux d’élans et de bisons…
Drapés dans les rayons de l’aube matinale,
Le désert déployait sa splendeur virginale
xxxxxxxxSur d’insondables horizons…
Comme un reptile immense au soleil engourdi,
Le vieux Meschacébé, vierge encor de servage,
Dépliait ses anneaux de rivage en rivage
xxxxxxxxJusques aux golfes du Midi. »

(Louis Fréchette.)


Je ne vous raconterai point tous les incidents de l’exploration. Les découvreurs exultaient. Ils saluèrent le Mississipi « avec une joie que je ne peux pas exprimer », nous dit le Père Marquette. Bientôt les bois et les montagnes disparurent et le pays changea d’aspect ; ce fut l’horizon divin où devait planer un jour la mélancolie romantique de René. Des plaines aux douceurs d’Éden se déployaient à l’infini. « Il n’y a presque plus de bois ni de montagnes. Les îles sont plus belles et couvertes de beaux arbres ; nous ne voyons que des chevreuils et des vaches, des outardes et des cygnes sans ailes… »

Les canots descendent ainsi plus de soixante lieues, dans le silence, sans rencontrer âme qui vive.

Enfin, le 25 juin, des pas d’hommes apparaissent sur le sable. Jolliet et Marquette prennent un petit sentier, à travers la prairie, qui les conduit à un village indien. C’est là que les deux découvreurs entendent, dans la bouche d’un vieux chef illinois, une parole qui a dû les remuer d’un noble orgueil et qui ajoute à notre fierté françai-