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Notre Maître, Le Passé

c’est le désordre fatal et sans fin, suite de la faiblesse ou des faux calculs qui ont laissé violer l’ordre éternel des principes. La vérité, c’est qu’il existe une mécanique sociale aux rouages aussi précis et délicats que toute autre. Celui qui a disposé l’harmonie du monde matériel, n’est-il pas le régulateur suprême des sociétés humaines ? Au fond, quand les pontifes ont revendiqué avec intransigeance les droits de la suprématie de l’Église, ce ne sont point leurs droits personnels qu’ils ont revendiqués, non plus que les droits d’une société aux prérogatives hautaines, passionnée de domination. S’ils y ont mis tant de chaleur et d’énergie, c’est qu’ils avaient conscience de défendre un ordre divin, les bases essentielles de l’ordre social. Le droit de la société religieuse n’est après tout que le droit de la société civile, la juste subordination des deux pouvoirs pouvant seule créer l’ordre social harmonieux, celui qui dure par la vertu même de sa constitution. Autant de vérités que ne doit pas oublier l’historien qui entreprend de juger l’attitude politique de François de Laval. Ajoutons que l’évêque de Québec avait bien aussi quelques autres motifs de ne pas céder aux petits parlementaires gallicans du Conseil souverain. Il savait le prix d’une tradition, le devoir d’un fondateur de race et d’état. Gardien plus que tout autre de l’âme de la Nouvelle-France, il voulut qu’elle grandît dans la bienfaisance de l’ordre. Et nous devons à ce constructeur, l’empire du catholicisme sur notre vie nationale, la membrure d’acier où aime à s’appuyer notre jeune force.


Il fut surtout un grand évêque, ne se mêlant, au reste, à la politique que dans la mesure où le