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Page:Guèvremont - En pleine terre - paysanneries - trois contes, 1942.djvu/126

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Germaine Guèvremont

me éprouvait à l’égard d’un si noble cœur. Fierté que, dans son enthousiasme, il eut volontiers fait partager par toute la province, le pays entier, si un léger mouvement de retraite de la part du préfet ne l’eut averti à temps.

— Pauvre Jacquot ! disait une femme, la larme à l’œil, un si bon cœur d’homme ! Il aura attrapé un effort…

— Vos concitoyens, reprit le docteur, m’ont donc chargé d’épingler sur votre poitrine la médaille des braves.

Comme il était myope et que l’épingle ne voulait pas accrocher, il se contenta de déposer la médaille sur l’oreiller. Puis il prit le pouls du malade. De l’autre main, il tira sa montre qu’il examina attentivement. Après un long moment il fit signe aux assistants que le malade baissait à vue d’œil.

Rien à faire qu’à attendre la mort et à recueillir les dernières paroles du brave, s’il reprenait conscience. Aurait-il un mot doux pour Roseanne qui pleurait à chaudes larmes ? Ou prononcerait-il une de ces phrases mémorables qui font l’orgueil d’une famille et que chacun allonge ou farde aux couleurs de son imagination ? Soudain le mourant se